Patelin industriel en Pensylvannie,
ouvrier maniant un chalumeau,
Cimino plante son décor dès le début, entre les cheminées d'usine et le pub où une bande d'amis qui travaillent dans la même usine se détentent.
John Cazale, dont ce sera le dernier film, puisqu'atteint d'un cancer des os, durant le tournage, trinque avec ses amis,
dont De Niro et Christopher Walken.
Une grande fête se prépare, puisque Steven Pushkov, joué par John Savage, doit se marier.
L'occasion pour Cimino de filmer une interminable scène de mariage, en s'inspirant, certainement, de la scène d'ouverture du Parrain,
au cours de laquelle Nick//Walken fera sa demande à Linda//Meryl Streep.
Cette évocation festive du destin d'une petite communauté russe, en pleine Pensylvannie industrielle, fait ressortir la solidarité heureuse de ses membres, au travers de cette bande de potes qui ne rechigne pas à lever le coude,
et à interpeller un soldat,
qui revient du Viet-Nam !
La nouba se finit, et la troupe avinée se décide à partir chasser,
occasion pour le réalisateur pour nous montrer le contraste entre cette industrielle cité,
et cette nature immaculée.
Scène de chasse qui soude cette amitié virile,
et relie cette communauté à cette Terre de Pensylvannie !
Brutalement le décor change, et de ses montagnes, De Niro//Michael Vronsky se retrouve dans la jungle vietnamienne
,
à griller du vietcong avec son lance-flamme ! Contraste saisissant, rupture narrative qui nous plonge dans les horreurs de la guerre, loin de la douce Pensylvannie ! Fait prisonnier, avec Nick et Steve, reclus dans une cage plongée dans une rivière,
à regarder des géôliers faire jouer des prisonniers à la roulette russe !
Steven, Nick puis Michael y passeront ...
sous le regard effrayé de ses amis !
S'en sortant miraculeusement, la guerre du Viet-Nam se résumera à cette partie de roulette russe qui résumera l'atrocité de la guerre et permettra à Cimino, avec ce procédé narratif, de s'éviter de longues scènes guerrières. "Voyage ..." n'est en fait pas un film de guerre, mais une histoire sur les effets de la guerre !
Car lorsque Michael retournera dans son bled, dans son Amérique profonde,
pour retrouver les amis et la famille,
et notamment Linda, dont il était secrètement amoureux,
la communauté aura été profondément boulversée et les retrouvailles heureusement tristes,
au son d'un requiem émouvant.
Car la guerre a meurtri les jambes de Steve,
assis dans un fauteuil roulant pour le restant de sa vie ! Nick reste introuvable, et, pour Michaël, la quête va commencer, finissant dans un bouge de Bangkok,
autour d'un flingue,
et une assistance déchaînée pariant sur les vainqueurs de partie de roulette russe, encore elle !
Michael essaie de convaincre son ami Nick de ne pas y aller, allant même jusqu'à y participer,
mais rien n'y fera ...Nick, détruit psychiquement par la guerre, ne sera plus qu'un robot lobotomisé,
qui devra nécessairement trépassé !
Moment paroxystique du film, ce duel à la roulette entre les deux amis, l'un se prêtant au mortel jeu, pour essayer de sauver l'autre, en vain !
Retour en Pensylvannie, dans une Eglise orthodoxe,
pour l'enterrement de Nick, scène tragique répondant au bonheur partagé du début. Repas funèbre réunissant tous les amis,
dernier trinquage en l'honneur de Nick,
et le voile tombe sur histoire d'hommes !
Film sorti en 1979, presque au même moment qu'Apocalyspe Now, de Francis Ford Coppola, cet opus se distingue de son prestigieux homologue, primé à Cannes, par son intimisme singulière, tranchant avec le lyrisme wagnérien du premier ! Film sur les effets de la guerre, détruisant une petite communauté russe en Pensylvannie, The Deer Hunter n'est aucunement un film d'action guerrier, mais une évocation douce-amère sur l'implosion discrète d'une bande d'amis, soumis aux horreurs du conflit vietnamien, qui va crescendo, du mariage festif du début, à l'enterrement ému de la fin. Aux majestueux paysages montagnards d'Amérique, répondra cette roulette russe, allégorie de la guerre et fil conducteur du film, un peu trop présente et répétitive à mon goût, Cimino sombrant dans l'hyperbole un peu lourde, qui n'avait pas lieu d'être.
La scène du début est un peu longuette, pour ne pas dire interminable, occupant près du tiers du film, qui a le mérite d'ancrer l'histoire dans une communauté humaine, mais qui plombe un peu l'histoire par sa langueur monotomne !
Il n'en reste pas moins que le film reste une réussite, même si il a un peu vieilli, avec son tempo pianissimo qui peut servir de bon somnifère !
L'évocation de cette ville ouvrière avec cette communauté russe est émouvante, dans le bonheur comme dans le malheur, et la scène finale, où tous les amis se retrouvent autour d'une table, honorant la mémoire de Nick, illustre la solidarité sourde qui relie ces hommes et ces femmes, qui ne se laisseront pas abattre par la disparition tragique d'un des leurs !
Il se dégage, encore aujourd'hui, une profonde nostalgie, de The deer hunter, évocation d'un paradis perdu détruit par la guerre, sous la musique de Stanley Myers.